Les plantes exotiques envahissantes : un fléau sous la loupe des scientifiques

Renouée du Japon
La renouée du Japon, une plante exotique envahissante. Photo : iStock

Les hivers québécois sont rudes pour la plupart des plantes qui ne sont pas natives de notre territoire, mais certaines espèces exotiques parviennent tout de même à s’y répandre rapidement. Ces plantes peuvent menacer la biodiversité, et certaines sont même dangereuses pour l’être humain. À l’occasion du 88e Congrès de l’Acfas, la communauté scientifique s’est rassemblée pour discuter de ce fléau.

Une plante exotique envahissante, c’est tout simplement une espèce qui n’est pas native d’un territoire et qui se répand sur celui-ci au détriment des espèces locales. Certaines plantes sont plus problématiques que d’autres, et il n’est pas toujours facile de s’en débarrasser.

« Les plantes exotiques envahissantes diminuent la biodiversité. Ces plantes-là, souvent, elles n’ont pas de prédateurs naturels sur le nouveau territoire qu’elles envahissent. Elles compétitionnent donc de manière inégale avec les plantes locales. Elles prennent beaucoup de place lorsqu’elles sont établies dans une région », explique Elisabeth Levac, docteure en sciences de la terre et professeure au Département de l’environnement et de la géographie de l’Université Bishop’s.

Pour mieux comprendre le problème, un colloque de l’Acfas sous la responsabilité d’Elisabeth Levac et de Bruno Courtemanche, de l’Université Bishop, a permis de rassembler la communauté scientifique autour de cette question.

La lutte contre les plantes exotiques envahissantes est ardue, mais elle n’est pas impossible. Des mesures novatrices permettent de cibler les points faibles de certaines espèces pour tenter de les éliminer des milieux qu’elles envahissent, comme dans le cas du myriophylle à épis.

Des méthodes d’arrachage et de contrôle de cette plante aquatique envahissante sont à l’étude, un nouvel appareil permet notamment de la retirer d’un milieu en aspirant les fragments de plantes qui pourraient répandre l’espèce ailleurs lors de l’arrachage.


Voici d’autres contenus qui pourraient vous intéresser : 


 

Des espèces plus nocives que d’autres

Les plantes exotiques qui sèment l’inquiétude ont généralement des effets nocifs visibles sur les milieux qu’elles envahissent. C’est le cas du myriophylle et d’autres plantes aquatiques qui peuvent rapidement se répandre dans un lac. 

« Souvent, elles vont former des herbiers assez denses et désavantagent des plantes locales en l’absence de prédateurs. Quand ces herbiers-là meurent à la fin de l’été, la décomposition fait qu’il y a une baisse assez marquée de l’oxygène dans l’eau, ce qui est mauvais pour les poissons ou les organismes qui vivent au fond de l’eau. Ils se retrouvent à manquer d’oxygène dans certains cas », précise Elisabeth Levac.

Pour ce qui est des espèces poussant sur la terre ferme, la scientifique nous met en garde contre des plantes comme la renouée du Japon, une espèce qui est parfois laissée à elle-même en raison de sa beauté, mais qui prend rapidement le dessus sur les autres plantes qui l’entourent. Une fois qu'elles sont établies, il est extrêmement difficile de s’en débarrasser.

« Même si on la coupe, elle repousse; les herbicides ne fonctionnent pas vraiment… Il faut couvrir le sol après avoir coupé la plante et s’assurer qu’il n’y a pas de repousses sur les côtés. C’est des plantes ‘’maléfiques’’, c’est vraiment difficile de les contrôler », affirme la professeure de l’Université Bishop’s.

Berce du Caucase

La berce du Caucase, une plante exotique envahissante qui possède une sève caustique. Photo : iStock

Certaines plantes peuvent aussi représenter un danger direct pour les êtres humains, comme le nerprun, un arbuste envahissant toxique qui prend rapidement la place des plantes locales lorsqu’il est implanté dans un nouveau milieu. La berce du Caucase est une autre plante envahissante toxique bien répandue et qui peut même causer des lésions brûlantes en raison des toxines contenues dans sa sève.

 

Sensibiliser la population

Selon Elisabeth Levac, il faut sensibiliser la population à cette problématique afin de lutter de manière efficace contre les plantes exotiques envahissantes, car celles-ci sont parfois répandues involontairement par l’être humain.

Les plantes problématiques ne sont généralement pas vendues dans les pépinières, mais comme elles sont déjà bien répandues sur le territoire québécois, elles continuent à proliférer.

« Même en mettant une réglementation en place, la plante est déjà présente partout. Souvent, les municipalités ne vont pas intervenir. S’il y a une plante envahissante dans un quartier, elle risque de se répandre dans toutes les cours arrière. Si la population collabore, il y a moyen d’éliminer ces plantes-là », explique Elisabeth Levac.

Pour agir contre ces plantes, il faut aussi savoir les reconnaître. C’est donc toujours un bon réflexe d’identifier les plantes inconnues qui apparaissent sur notre terrain afin de savoir comment y réagir. Pour ce faire, des sites comme l’herbier du Québec et certaines communautés sur les réseaux sociaux peuvent être bien utiles.

Ensuite, il faut se renseigner au cas par cas afin de trouver la meilleure solution pour se débarrasser des plantes qui sont un peu plus tenaces que la moyenne.

Pour les personnes qui possèdent des embarcations nautiques, Elisabeth Levac rappelle que c’est aussi toujours un bon réflexe de les nettoyer avant de les utiliser dans un nouveau cours d’eau. Cela peut éviter le transport de fragments de plantes invasives, comme dans le cas du myriophylle.

Chaque personne peut participer, il suffit de faire preuve de vigilance et de se renseigner en cas de doute. Les scientifiques continuent d’étudier la situation de près afin de trouver les meilleures solutions pour lutter contre ces végétaux tenaces.