Bulletin spatial : 5 défis à surmonter pour vivre dans l’espace

L'astronaute David Saint-Jacques lors d'une sortie dans l'espace.
Photo : ASC / NASA

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Dans la cinquième émission de Bulletin spatial, Pierre-Yves Lord s’intéresse à tout ce qui entoure le fait d’habiter dans l’espace. Pour trouver des réponses à ses questions, il rencontre l’astronaute David Saint-Jacques, qui a lui-même passé 204 jours à vivre en apesanteur dans la Station spatiale internationale (SSI).

Si les scientifiques étudient encore les effets à long terme de la vie dans l’espace sur le corps humain, on sait déjà à tout le moins quelques-uns des aspects du quotidien des astronautes qui changent du tout au tout lors de leur séjour loin de la surface de notre planète. Que ce soit sur la SSI ou en mission sur Mars, l’être humain doit s’adapter à son nouvel environnement!
 

Bien choisir sa nourriture

Dans l’espace, il ne faut pas manger n’importe quoi, et il n’est pas seulement question de surveiller sa ligne! En microgravité, la nourriture qui s’émiette facilement est à proscrire.

L’explication est simple : si sur Terre les particules de nourriture ne représentent qu’un léger inconvénient pour la propreté, dans l’espace, elles peuvent facilement endommager des équipements, se retrouver dans un œil ou être inhalées par accident.

L'astronaute David Saint-Jacques montre l'effet de la microgravité sur le miel.

Sur la SSI, les astronautes ont donc accès à des variantes de certains produits, comme des biscuits ou du pain qui ne produisent pas facilement de particules flottantes. Le poivre et le sel en grains sont évidemment bannis, remplacés par des pâtes d’assaisonnement, parce que des épices dans les yeux ou les narines, ce n’est plaisant pour personne!

Heureusement pour les êtres humains qui en viendraient à coloniser Mars, la gravité y est suffisante pour qu’on puisse aisément y manger les mêmes aliments que sur Terre.

 

S’adapter pour dormir en microgravité

En raison de la microgravité, les astronautes de la SSI dorment dans des petites cabines spécialement conçues avec des sangles qui leur permettent d’éviter de flotter à la dérive durant leur sommeil. Ils et elles utilisent aussi des sacs de couchage qui permettent d’amortir les chocs et de maintenir le corps dans une position neutre afin d'éviter toute gêne ou tension musculaire.

Un astronaute en plein sommeil dans la SSI.

L'espace de sommeil d'un astronaute dans la SSI. Photo : NASA

L’éclairage à l’intérieur de la SSI est aussi adapté pour compenser son rythme de « journées » extrêmement courtes, en raison de son orbite autour de la Terre qui se fait en seulement 90 minutes. En 24 heures, les astronautes à son bord peuvent assister à 16 levers et 16 couchers de soleil. Avec les lumières de l’habitat spatial, on tente de reproduire autant que possible le cycle journalier terrestre, pour réduire les perturbations du rythme circadien des personnes à bord.

Un sommeil adéquat est essentiel pour que les astronautes conservent leur bien-être physique et mental pendant les missions spatiales de longue durée.

Les premiers êtres humains qui devront passer de longs séjours sur Mars auront à s’adapter, puisque la gravité de la planète rouge est équivalente à 38 % de celle sur Terre. Les journées martiennes, qui ne font que 37 minutes de plus que les nôtres, ne devraient toutefois pas être trop troublantes! 

 

Se protéger des rayons du Soleil

Le Soleil émet une variété de rayonnements dangereux – notamment des ultraviolets (UV), des rayons X et des rayons gamma – qui peuvent pénétrer dans le corps humain et endommager les cellules, l'ADN et d'autres molécules biologiques

L'atmosphère terrestre nous protège en bloquant une importante partie de ces rayonnements, bien qu’il faille tout de même faire attention aux UV, mais, dans l’espace, il faut bien plus qu’une simple crème solaire pour protéger les astronautes.

Le soleil vu de la SSI.

Photo : NASA

Selon différentes études menées par la NASA, une exposition prolongée au rayonnement solaire peut augmenter le risque de développer un cancer, endommager le système nerveux central ou même altérer le système immunitaire. C'est pourquoi les astronautes utilisent des combinaisons spatiales spécialisées et d'autres protections fixées sur les engins spatiaux pour minimiser leur exposition au rayonnement solaire et assurer leur sécurité et leur bien-être. 

Comme l’atmosphère de Mars est quasi inexistante en comparaison avec celle de la Terre, la surface de la planète est bombardée par ces rayonnements dangereux, les mêmes protections sont donc de mise pour les astronautes qui exploreront un jour la planète rouge.
 

Participer à un régime d’exercice rigoureux

Les compétences et l’intelligence ne suffisent pas pour devenir astronaute, il faut aussi être en excellente forme physique! Les effets d’une gravité réduite sur le corps humain peuvent être dévastateurs, et l’entraînement est nécessaire pour se protéger.

Sous l’effet de la microgravité, les muscles et le système cardiovasculaire sont beaucoup moins sollicités lors d’un séjour dans l’espace, puisque le corps n’a plus à supporter son propre poids.

Les astronautes doivent donc s’entraîner tout au long de leur séjour dans l’espace pour combattre les effets négatifs de l'apesanteur sur leurs muscles et leurs os, et éviter l’atrophie à leur retour sur Terre. L'exercice fréquent contribue à maintenir la santé physique des astronautes et à lutter contre la perte de masse musculaire et osseuse. Des spécialistes au sol prescrivent et contrôlent des programmes d'exercices adaptés aux besoins de chaque personne et à la durée de la mission. 

Une astronaute s'entraîne à bord de la SSI.

L'astronaute américaine Karen Nyberg lors d'un entraînement à bord de la SSI. Photo : NASA

Des équipements spécialement conçus pour la SSI, tels que des tapis roulants et des dispositifs de résistance, simulent la gravité terrestre et permettent un entraînement cardiovasculaire et musculaire. 

Malgré tout, le retour sur Terre est toujours très difficile pour les astronautes, puisque leurs corps mettent du temps à se réhabituer à la gravité.

Les premières personnes à fouler la surface de Mars devront aussi se soumettre à un régime d’exercice similaire à celui des astronautes de la SSI tout au long de leur mission, en raison de la gravité plus faible de la planète rouge. Une personne d’un poids de 150 lb sur Terre ne pèserait que 57 lb sur Mars!
 

Recycler son urine... pour la boire

Si l’eau est abondante sur Terre, elle n’est pas aussi facilement accessible dans l’espace. C’est pour cette raison que sur la SSI, l’eau de toutes les sources d’humidité est recyclée par un système interne qui permet de la rendre potable.

Parmi ces sources d’humidité, on trouve notamment l’urine des astronautes (et des animaux qui sont parfois à bord), leur sueur ainsi que la condensation émise par leur respiration. Selon la NASA, l’eau utilisée à bord de la SSI est ainsi recyclée à plus de 90 %, ce qui permet d’utiliser des réserves d’eau relativement modestes sur une longue période.

Le même système de recyclage pourrait servir sur Mars, mais la NASA explore aussi d’autres avenues pour l’accès à l’eau, notamment en recherchant des sources d’eau souterraine ou en envisageant d’exploiter la glace qui existe à la surface de la planète.

L'astronaute canadien Chris Hadfield montre le comportement de l'eau en microgravité.