Comment ça va le Nord? : une série aux premières loges de la crise climatique

Une prise de vue de l'émission Comment ça va le Nord?

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Le Grand Nord se réchauffe, rapidement. Les communautés qui habitent ce vaste territoire sont témoins des bouleversements climatiques qui s’accélèrent, qui transforment la nature et leur mode de vie. Installé au Yukon depuis 2011, le documentariste Simon D’Amours illustre cette réalité émergente dans la série Comment ça va le Nord? en allant à la rencontre des hommes et des femmes qui peuplent le nord du 60e parallèle.

Réalisateur, producteur et animateur, Simon D’Amours a décidé de se contenter d’un mode de vie simple, au cœur de la nature. Il vit dans une maison sans eau courante, il cultive une partie de ses légumes, il chasse, cueille et pêche sa nourriture, et il tente de réduire ses habitudes de consommation. Il considère que de vivre de cette manière au cœur du territoire qu’il documente lui apporte une perspective qu’il n’aurait pas autrement.

« C’est sûr et certain que ça change tout. J’ai vu les choses évoluer depuis 10 ans ici. Il fait de moins en moins froid, mais il y a plus de neige en hiver; les choses changent concrètement. On la ressent [la crise climatique], on la voit. Les glaciers qui fondent, les animaux… Il y a beaucoup de choses qui changent. »

Le réalisateur Simon D'Amours

Le réalisateur Simon D'Amours.

Ce sont ces constats qui ont d’ailleurs poussé le documentariste à agir, à sa manière, pour mettre en lumière la réalité du Grand Nord à l’ère de la crise climatique. 

Il faut faire attention à notre planète. Moi, c’est ma façon d’aider, en faisant de la télé et en essayant d’ouvrir les yeux des gens sur ce qu’il se passe.

Si le Grand Nord n’abrite qu’une population d’environ 113 000 personnes, il représente à lui seul 40 % de la masse terrestre du Canada, ce qui en fait aussi l’un des plus vastes territoires sauvages de la planète. Son destin est lié à celui de nombreuses espèces animales et végétales et, ultimement, à celui de la population canadienne.

Pour la deuxième saison de Comment ça va le Nord?, Simon D’Amours continue de laisser place à la voix des gens de sa communauté et des spécialistes qui travaillent d’arrache-pied pour mieux protéger l’environnement. 

 

Un paradoxe environnemental

Le réalisateur n’hésite pas à se décrire comme un environnementaliste, tout en assumant ce qu’il appelle lui-même son côté « redneck ». Selon lui, cet amalgame décrit assez bien la dualité des gens du Grand Nord, et plus spécifiquement au Yukon.

Les communautés du Grand Nord vivent en effet une réalité plutôt contradictoire : elles sont extrêmement attachées à la nature et sont les premières à constater les effets de la crise climatique sur l’environnement, mais une bonne partie de l’économie de la région repose sur l’exploitation des ressources naturelles, surtout sur l’extraction minière, une industrie qui possède généralement une piètre empreinte écologique.

C’est aussi l’énergie fossile, plus spécifiquement le diesel, qui est souvent la seule source d’électricité pour de nombreuses communautés, en plus d’être le carburant qui permet d’alimenter les véhicules tout terrain nécessaires aux déplacements sur le territoire.

Simon D'Amours rencontre l'exploitant d'une petite opération minière.

Simon D'Amours rencontre l'exploitant d'une petite opération minière dans la saison 2 de Comment ça va dans le Nord?.

« C’est étrange! Le Yukon est peuplé de gens qui sont à la fois des rednecks et des amoureux de la nature, car l’un n’empêche pas l’autre! Beaucoup ont un amour des moteurs, font de la motoneige, mais en même temps, on ne jettera jamais rien à terre, on va éteindre nos feux, on aime la nature, on va être conscients de ce qui se passe », précise Simon D’Amours.

Le réalisateur explique aussi que les initiatives écologiques qui peuvent exister ailleurs ne s’appliquent pas nécessairement à la réalité du Grand Nord. Il cite en exemple les véhicules électriques, qui n’ont pas trop de sens d’un point de vue environnemental dans une région où l'électricité est produite à partir d’énergies fossiles.

Il mentionne qu’il ne faut donc pas pointer du doigt la population locale, qui doit adapter son mode de vie à une réalité bien différente de celle des grandes villes canadiennes, mais plutôt réfléchir à notre mode de consommation au sens large, à l’échelle de la planète. 

[Les mines], elles sont là parce qu’il y a des besoins ailleurs sur la planète. Le nouvel iPhone, le MacBook, les voitures électriques... Je ne pense pas que localement, il y a un problème au Yukon; c’est la planète! Si tu achètes un nouvel iPhone chaque année, c’est sûr qu’il faut qu’ils fassent des mines et qu’ils extraient du minerai! 

L’économie traditionnelle locale, celle qui répond directement aux besoins de la population du Grand Nord depuis des générations, se base plutôt sur la chasse, le trappage, l’art et l’artisanat, des activités qui se font à plus petite échelle et dans le respect de l’environnement.

 

Ce que le Grand Nord peut nous apprendre

Selon Simon D’Amours, il faut s’inspirer de la résilience des communautés du Grand Nord et de leur rapport souvent bien différent face au consumérisme.

« Les gens sont moins axés sur le paraître et plus sur le fait d’être. On pense aux besoins primaires. Beaucoup ont des jardins, on pousse fort au niveau de l’agriculture pour être capables d'être autosuffisants. »

Simon D'Amours va à la rencontre des habitants et des habitantes du Grand Nord.

Les premières nations représentent 86 % de la population du Nunavut, 51 % de celle des Territoires du Nord-Ouest et 23 % de celle du Yukon.

C’est cet esprit de décroissance, de réduction de la consommation qui motive l’animateur de Comment ça va le Nord? et qui lui donne espoir pour l’avenir de notre planète. 

« Je pense qu’il y a un futur si le monde ralentit. Si on se conscientise et qu’on ralentit le train, on en est capables, même si ce ne sera jamais pareil comme avant », explique-t-il.

Le documentariste encourage les jeunes, et les moins jeunes, à se recentrer sur l’essentiel, à repenser leur mode de consommation et, surtout, à profiter du plein air pour se réconcilier avec la nature. Il prône un mode de vie en toute simplicité, loin des écrans, plus près de la verdure.

Je veux vraiment, mais vraiment simplifier ma vie. Et je conseillerais à tout le monde de le faire! Et pas besoin d’être au Yukon pour le faire; même à Montréal, la verdure est là, les parcs sont là, il y a des occasions. Sortez de chez vous et allez marcher! Partout sur la planète : allez jouer dehors! Ça va vous conscientiser et changer votre point de vue sur tout! 

La saison 2 de Comment ça va le Nord? est diffusée en primeur sur ICI Explora, tous les vendredis à 20 h 30.