La séparation de la Floride

La séparation de la Floride

En votant à 3 contre 2 pour se séparer de la Floride, les autorités du sud de cet État n’ont pas seulement signalé au reste du monde leur mécontentement. C’est peut-être le premier mouvement du genre à avoir pour motivation... le réchauffement climatique.

Officiellement, la Commission de la ville de South Miami a voulu faire part de son sentiment d’aliénation face au gouvernement de la Floride, qui loge dans le nord de l’État. Par trois voix contre deux, la Commission a voté une résolution le 7 octobre, demandant que la Floride du Sud quitte la Floride et devienne le 51e État américain. Or, la résolution s’appuie surtout sur un problème environnemental : la hausse du niveau des eaux, qui menace toute cette région.

Explication. Alors que l’élévation moyenne des terres dans le nord de la Floride est de 36 mètres au-dessus du niveau de la mer, elle est de moins de 17 mètres dans le sud, avec une large portion du territoire où l’élévation moyenne n’est que de 4 mètres. On trouve même dans cette région le deuxième plus grand lac d’eau douce des États-Unis, le lac Okeechobee. Sans oublier la ville d’Orlando, le parc des Everglades... et deux réacteurs nucléaires situés à moins de 2 mètres au-dessus du niveau de la mer.

La résolution conclut en insistant sur la réalité climatique : « Attendu que les changements climatiques constituent une réalité scientifique résultant en un réchauffement et une hausse du niveau de la mer. Attendu qu’il est estimé qu’il y aura une hausse de 1 à 2 mètres du niveau de la mer d’ici à la fin de ce siècle. Que de plus, la Floride du Sud repose sur un roc très poreux et qu’au niveau où la mer s’élèvera, la pression amènera l’eau à passer par le sous-sol et à inonder les terres intérieures... »

Le territoire visé par cette « séparation » composerait 39 % de l’actuelle Floride et 67 % de sa population — et 69 % de ses revenus. En fait, d’ici quelques décennies, une partie de ces terres auront quitté l’État qu’on le veuille ou non, parce qu’elles auront été noyées. Déjà, la ville de Miami, sur la côte, doit dépenser des centaines de millions de dollars rien que pour contenir l’océan.

Les médias locaux doutent : une telle résolution aurait besoin de l’appui du gouvernement de Floride, un scénario d’autant moins probable que l’actuel gouverneur de Floride, Rick Scott, en campagne pour sa réélection, s’est montré sceptique face au réchauffement, se contentant de dire « je ne suis pas un scientifique ».

Il faut souligner que les États-Unis ont toujours abrité des mouvements indépendantistes. Celui du Texas apparaît parfois sur le radar. Mais ces mouvements sont généralement motivés par une colère à l’égard de Washington. Rarement par une colère à l’égard de leur propre État. Et encore moins par le réchauffement climatique.