Le « procès » d'un superaliment

Le « procès » d'un superaliment

Depuis une dizaine d’années, le kale est très à la mode. On le mange cru, cuit à la vapeur, sauté et même sous forme de croustilles ou de jus. En Californie, le nombre de fermes cultivant le kale est passé de 954 en 2007 à 2 500 en 2012!

On prête à ce légume toutes sortes de vertus en raison de sa forte teneur en calcium, en magnésium, en potassium, en vitamine K, en antioxydants et en fibres. Mais récemment, un article a ébranlé les convictions de plusieurs fanatiques de la bonne nutrition en affirmant que le kale pouvait être dangereux pour la santé.

Cette allégation est tirée d’une recherche effectuée par Ernie Hubbard, un biologiste moléculaire travaillant dans une clinique de médecine alternative, en Californie. Selon lui, le kale et les autres légumes de la famille du chou (chou, brocoli, chou-fleur, chou de Bruxelles) contiendraient des concentrations élevées de métaux lourds, notamment du thallium et du césium. Il n’en fallait pas plus pour qu’apparaissent sur le web des titres sensationnalistes comme « Le kale est-il toxique? » ou « Le kale, un tueur silencieux ».

Or, ces résultats sont controversés et pour plusieurs raisons. D’abord, ils proviennent d’une seule étude menée sur 20 participants qui consommaient du kale et d’autres choux en grande quantité, et ce, quotidiennement. Ces personnes ont consulté M. Hubbard parce qu’elles souffraient de symptômes plutôt évasifs : fatigue, arythmie, perte de cheveux, problèmes cutanés et digestifs.

Intrigué, le chercheur a analysé l’urine des patients de même que des feuilles de kale et il y a décelé de fortes concentrations de thallium et de césium. Mais rien n'indique que les maux décrits par ces individus soient provoqués par la consommation de kale.

D’autres questions restent aussi sans réponse : les métaux lourds détectés dans le kale viennent-ils du sol ou de l’eau d’irrigation? Le problème d’accumulation de métaux lourds dans le kale est-il spécifique à la Californie? Pour valider les résultats énoncés dans l’étude de M. Hubbard, il faudrait entreprendre des recherches supplémentaires impliquant un plus grand nombre de sujets et un groupe contrôle.

Autre fait troublant : dans le cadre de cette étude, M. Hubbard a été engagé par une compagnie pour tester un nouveau produit détoxifiant, d’où un possible conflit d’intérêts.

En conclusion, pourquoi ne pas jouer de prudence et suivre le conseil que les nutritionnistes s’évertuent à répéter : varier son alimentation!