Naviguer au Québec : portrait d’un marin

Naviguer au Québec : portrait d’un marin

Ce soir, dès 22 h, ICI Explora présentera le premier épisode de Méga convois. Dans cette série, les travailleurs aux prises avec des charges immenses et souvent peu mobiles doivent redoubler d’imagination pour effectuer leurs déplacements de la façon la plus sécuritaire possible.

Au Québec, même s’il est peu connu, le milieu du transport maritime est bien actif. Le travail en mer peut s’avérer exigeant, et pour en apprendre plus sur le quotidien des Québécois qui ont pris les voiles comme métier, nous avons discuté avec Simon, matelot depuis six ans déjà. Faites une incursion dans la vie d’un homme de roue :

D’entrée de jeu, peux-tu nous expliquer quelles sont les fonctions d’un homme de roue?

Par définition simple, un homme de roue conduit le bateau. Il faut par contre faire la distinction entre mon travail et celui du pilote. Lorsqu’on navigue, j’ai constamment la roue du bateau entre les mains et je réponds aux commandes du pilote. C’est plutôt lui qui décide de notre direction. De mon côté, je m’assure qu’on garde le cap vers la destination souhaitée, selon des coordonnées qui me sont transmises.

Lorsqu’on est en eaux dites « non abritées », on est sur le pilote automatique, et je ne suis pas tenu de rester en tout temps dans la timonerie. [La timonerie d’un bateau, aussi appelée « passerelle », est le compartiment où s’effectue la navigation.] Je vais alors rejoindre les autres marins pour travailler à la maintenance sur le pont. Lorsqu’on est au port, j’assiste aux chargements et aux déchargements.

Comment as-tu décidé de gagner ta vie sur des bateaux?

Je travaillais dans des bureaux, et ça faisait un moment que j’avais besoin de changement. Je connaissais quelqu’un qui travaillait dans la marine marchande et il m’en parlait avec beaucoup de bien. Je ne vous cacherai pas qu’on m’a surtout vanté les vacances. Avec nos horaires, on a souvent la possibilité de partir en voyage pour plusieurs semaines lorsqu’on termine un contrat. J’ai donc décidé de me réorienter. J’ai mis toute ma vie dans un entrepôt, j’ai laissé aller mon chien et juste la première année, j’ai travaillé pendant 10 mois. Je pensais que ce serait un travail temporaire, mais j’y ai pris goût. Ça fait maintenant plusieurs années que je suis marin et j’aime encore ça.

Tu as parlé des horaires. Comment ça fonctionne quand on doit partir plusieurs semaines d’affilée en mer? As-tu des jours de congé?

[Rires] On n’a ni congés ni fins de semaine lorsqu’on est à bord. Si on signe un contrat de deux mois, ce sont deux mois consécutifs de travail, chaque jour. On voit plusieurs durées de contrats pouvant aller de trois semaines à même cinq mois consécutifs. Il faut dire que les vacances, ensuite, sont à la hauteur des jours travaillés.

Le problème qu’on a ces dernières années, c’est le manque de main-d’œuvre. Je connais des gens qui n’ont pas pu quitter le bateau à la fin de leur contrat parce qu’il n’y avait personne pour les remplacer. Selon notre syndicat, on ne devrait pas faire plus de 144 jours consécutifs de travail. Chaque marin d’une équipe est primordial au fonctionnement du bateau; si personne ne peut te remplacer, c’est tout le fonctionnement de l’équipage qui en est affecté. On doit donc rester le temps qu’on trouve quelqu’un d’autre, et tes vacances doivent attendre.

J’imagine que tu as vu toutes sortes de paysages en quelques années en mer. Quel contrat t’as le plus marqué?

Le Nord, sans hésiter. Les paysages sont magnifiques et ne ressemblent à rien de ce qu’on connaît. Les banquises, les animaux, les énormes glaciers et les aurores boréales, c’est un spectacle incroyable. Les conditions sont évidemment très différentes, aussi. Quand tu t’embarques pour un contrat dans cette région, c’est toujours pour plusieurs mois. C’est comme un défi au moment de commencer, et quand tu remets le pied à terre, c’est un énorme sentiment d’accomplissement.

Sur les eaux du Québec, quels types de cargaisons et de bateaux voit-on majoritairement?

Il y a des vraquiers, qui transportent des marchandises en vrac [sel, sable, minéraux et céréales]. Ensuite, on trouve des cargos avec d’énormes conteneurs et des pétroliers qui, comme c’est le cas de celui sur lequel je travaille, transportent du pétrole. Dans ce cas précis, on ne voit rien lors des chargements, puisque tout se fait avec d’énormes tuyaux et des pompes. Notre travail, c’est alors de nous assurer que le bateau conserve sa balance en changeant les niveaux d’eau dans le bateau. Pour les vraquiers et les cargos, le transport peut rapidement devenir compliqué, avec les énormes marchandises que l’équipage doit décharger.

Au moment de notre discussion, Simon venait de terminer un contrat de quelques semaines. À peine de retour chez lui, il préparait sa valise pour un autre voyage. Il dit vouloir en profiter pendant que sa situation familiale le lui permet et que ce sera au moment d’avoir des enfants qu’il jettera l’ancre pour de bon.

Ne manquez rien des moyens de transport les plus spectaculaires et soyez au rendez-vous de Méga convois tous les mardis à 22 h sur les ondes d’ICI Explora.