C’est dans les eaux glacées de l’Arctique que Mario Cyr a plongé à répétition pour capter certaines images du documentaire Odyssée sous les glaces, qui sera diffusé en version longue sur ICI Explora ce samedi à 21 h. Les scènes tournées par Mario Cyr et son équipe dans cette région névralgique du monde témoignent de la fragilité de notre écosystème et de l’évolution rapide de la crise climatique. Le célèbre plongeur nous raconte cette aventure vécue en terre de glace, des périples sous-marins près des ours polaires aux nuits froides sur la banquise.
Avec plus de 12 000 plongées à son actif à travers le monde, Mario Cyr n’hésite pas à affirmer que chaque sortie sous l’eau demeure fascinante. « C’est toujours surprenant, on ne connait pas encore grand-chose des mondes sous-marins. À chaque plongée, on va chercher de nouveaux petits morceaux d’information. C’est toujours aussi fascinant », explique-t-il.
Pour Odyssée sous les glaces, c’est entre autres avec les ours et les morses qu’il s’est aventuré sous l’eau. En travaillant de pair avec Jill Heinerth, une autre plongeuse canadienne de grande expérience qui a notamment travaillé avec la BBC et National Geographic, il a capturé des images stupéfiantes de ces grands mammifères. Pour plonger avec ces créatures aussi splendides que dangereuses, la vigilance est de mise.
Jill Heinerth et Mario Cyr / Photo : Jean-Benoit Cyr / Galafilm
« On ne peut pas s’habituer à plonger avec des morses ou des ours polaires. On va développer des techniques, mais la peur reste là. Ça reste des prédateurs extrêmement dangereux, il faut toujours avoir une porte de sortie. Il faut toujours rester attentif, se faire confiance et essayer de détecter le plus possible les caractères des animaux », précise le Madelinot. Il en profite pour souligner l’adresse et le courage dont sa compatriote Jill Heinerth a fait preuve en effectuant ses premières baignades avec les ours polaires et les morses pour le documentaire.
« Je plonge avec des ours polaires oui, mais je ne plonge pas avec tous les ours polaires. Il y en a qui sont plus vieux, balafrés, des bagarreurs : on les laisse tranquille ceux-là. » - Mario Cyr
Une région affectée par le climat
Mario Cyr est un habitué de l’Arctique. Au cours de sa carrière, il a eu l’occasion d’y mettre les pieds une quarantaine de fois. Des années 1990 à aujourd’hui, il a ainsi été aux premières loges pour observer les impacts des changements climatiques sur cette région du monde. « J’ai pu constater cette dégradation de la glace, c’est quelque chose de très visuel. La superficie et l’épaisseur de la glace diminuent, c’est palpable. Les endroits spécifiques où nous allions auparavant avec beaucoup de glace ne sont plus du tout comme autrefois. »
En plus de la fonte des glaces, ces changements se reflètent aussi dans une saison des pluies décalées et des animaux qui changent leurs habitudes et leurs comportements, à la recherche des banquises et de nourriture. « On retrouve aussi de nouveaux animaux. Il y a de plus en plus d’épaulards, qui n’ont pas la morphologie pour circuler sous les glaces. Ils se rapprochent, car l’eau remplace la glace. »
Dans ces conditions, les tournages sont beaucoup plus difficiles à prévoir et à organiser pour les équipes qui travaillent sur des documentaires. Avec la fonte des glaces et les déplacements imprévisibles des animaux, elles doivent faire preuve d’une grande souplesse logistique afin de mener à terme leur projet.
Mario Cyr raconte son arrivée sur la banquise du détroit de Lancaster
Le Madelinot souligne que cette nouvelle réalité de l’Arctique est surtout une tragédie climatique qui vient bouleverser le quotidien des communautés inuites qui y vivent. « Quand ils ont toujours été à des endroits pour pêcher et chasser, quand ils arrivent aujourd’hui et qu’il n’est plus possible de faire ce que leurs parents et leurs grands-parents ont toujours fait, ça amène une certaine morosité. Tout est affecté. »
Les suites du périple
En plus de la diffusion du documentaire en version longue le 28 décembre sur ICI Explora, une application mobile a été développée pour les téléphones iOS et Android. Les utilisateurs peuvent y retrouver les images des périples de Mario Cyr et Jill Heinerth en Arctique et en apprendre plus sur la région et les animaux qui y cohabitent.
« L’application, je la trouve superbe ! Je donne des conférences dans les écoles primaires, les professeurs nous disent que c’est un outil extraordinaire d’apprentissage pour les recherches des jeunes. J’y dirige aussi les gens qui veulent plus d’informations sur les animaux. Ce que j’aime, c’est que l’on peut aussi améliorer cette application au fur et à mesure que l’on va avoir des nouvelles des animaux et de l’Arctique », indique le plongeur.
Mario Cyr affirme qu’il continuera de surveiller de près les changements en Arctique, et il n’écarte pas la possibilité d’y retourner afin de donner suite au documentaire. Aurons-nous droit à une deuxième Odyssée sous les glaces? Il est trop tôt pour le dire, mais c’est quelque chose qui est actuellement envisagé selon le plongeur.
« Ça évolue très rapidement, on sait que l’année prochaine il y aura des changements significatifs par rapport à notre tournage en 2018. On pense déjà à y retourner et faire un deuxième documentaire ou à tout le moins un nouveau constat, car il est très important de suivre cette évolution » - Mario Cyr
L'univers de glace du Groenland