La réalité virtuelle pour affronter ses phobies

Jean-René Dufort et Marie-Pier Élie lors d'une expérience du Gros laboratoire.

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Est-ce qu’une expérience vécue en réalité virtuelle peut nous faire ressentir les mêmes émotions que si on la vivait pour vrai? Dans la plus récente émission du Gros laboratoire, des cobayes ont affronté une phobie bien répandue afin de répondre à cette question. 

C’est avec la phobie des araignées, qui toucherait de 3 à 15 % de la population, que l’équipe du Gros laboratoire a choisi de démontrer que les peurs de certaines personnes peuvent être provoquées très facilement par la réalité virtuelle.

Dans l’expérience diffusée mercredi à l’émission, les cobayes du Gros laboratoire devaient tenter de toucher à quatre araignées : deux en réalité virtuelle, deux dans le monde réel. Certaines personnes commençaient par les vraies araignées, d’autres par les virtuelles. Un dispositif électronique analysait la fréquence cardiaque des participants et des participantes tout au long de l’expérience.

Le rythme cardiaque des cobayes a augmenté d’une moyenne de 14 battements par minute en réalité virtuelle, comparativement à une augmentation de 35 battements par minute en présence des vraies araignées.

 

Les personnes qui ont participé à cette microétude vivaient donc vraisemblablement des émotions plus fortes dans la situation réelle que dans celle simulée par l’appareil de réalité virtuelle, mais les deux situations provoquaient leur phobie. Et chose curieuse, les cobayes n’ont pas réussi à toucher autant d’araignées dans le monde virtuel (avec un taux de réussite de 55 %) que dans le monde réel (65 %), malgré une nervosité moindre.

Même si les cobayes savaient très bien que les araignées présentées en réalité virtuelle n’existaient pas pour vrai, l’expérience était assez immersive pour les terroriser. Cette peur instinctive serait causée par l’amygdale, une partie du cerveau qui dicte les réactions comportementales.

Quand on s’expose à la peur, l’amygdale réagit en premier, ce qui fait que les émotions priment sur la logique.

 

- Jean-René Dufort, animateur de l’émission Le gros laboratoire

 

Un outil thérapeutique

Les appareils modernes de réalité virtuelle sont conçus pour offrir des expériences immersives qui arrivent même à tromper certains sens. Cette particularité de la technologie permet de créer des jeux interactifs divertissants, mais elle est aussi très utile pour les spécialistes du domaine de la santé qui utilisent la réalité virtuelle dans le cadre de différentes thérapies.

C’est l’outil parfait pour créer un milieu sécuritaire, où les moindres paramètres peuvent être contrôlés et dans lequel les personnes peuvent s’exposer graduellement, avec douceur, à leurs plus grandes peurs.

L’expérience du Gros laboratoire s'est concentrée sur la peur des araignées, mais la technologie peut facilement être adaptée à différentes phobies. 

Peur des hauteurs? Les thérapeutes pourraient, par exemple, utiliser la réalité virtuelle pour exposer une personne à des élévations graduellement plus grandes d’une séance à l’autre, et culminer avec un saut virtuel en parachute. 

Une étude sur la phobie des hauteurs menée en 2018 par l’Université d’Oxford a d’ailleurs permis de prouver l'efficacité de la réalité virtuelle pour vaincre ce problème.

Pour traiter sa phobie, il faut s’exposer à sa peur de façon progressive et répétée, mais sans créer de traumatisme.

 

- Jean-René Dufort, animateur de l’émission Le gros laboratoire

Des thérapies d’exposition de ce genre existaient déjà bien avant l’arrivée de la réalité virtuelle, mais le côté immersif de cette technologie permet une désensibilisation qui peut avoir un meilleur effet sur la patientèle que les thérapies habituelles, qui sont également plus ardues à suivre. 

Des applications comme oVRcome ont aussi démontré leur efficacité. Elles peuvent être téléchargées et utilisées à la maison pour apprendre à surmonter les peurs les plus communes. Sans remplacer les thérapeutes, ce type d’application peut être bien utile, particulièrement lorsqu’il est difficile d’accéder à une aide professionnelle.

Bien sûr, il est toujours recommandé de chercher l'appui d’une ressource spécialisée en cas de phobie plus sévère, comme celles qui déclenchent des crises de panique.

Au-delà des phobies, la réalité virtuelle est aussi employée pour traiter d'autres troubles qui peuvent affecter la psyché humaine, comme la schizophrénie ou encore les chocs post-traumatiques.