Lorsque le cinéma fait progresser la recherche

Interstellaire
Interstellaire, Paramount Pictures

La plupart des films présentés au cinéma sont avant tout une source de divertissement, mais une solide recherche scientifique et des innovations technologiques se cachent aussi derrière certains titres. Des œuvres de science-fiction aux films d’animation, l’industrie cinématographique a souvent mené à des découvertes significatives dans plusieurs domaines scientifiques.

 


Chaque semaine, découvrez un nouveau sujet technologique sur le blogue d'ICI Explora. Une rubrique à parcourir juste avant la diffusion de Planète techno, tous les vendredis à 19 h.


 

La reine des neiges et le mystère du col Dyatlov

Qui aurait pensé qu’un film d’animation de Disney nous aiderait à résoudre l’un des plus grands mystères de l’histoire de l’alpinisme? C’est pourtant ce qui s’est passé avec La reine des neiges et le fameux incident du col Dyatlov.

En 1959, neuf alpinistes sont morts dans des circonstances mystérieuses lors d’une sortie dans les montagnes de l’Oural. Leurs corps dévêtus ont été retrouvés dans la neige, parfois à plusieurs centaines de mètres du campement où les tentes avaient été déchirées de l’intérieur. Les théories sur la mort de ces hommes se sont multipliées et aucune n’est parvenue à rallier l’ensemble de la communauté scientifique jusqu’à la semaine dernière.

Une vidéo qui explique bien les formules utilisées par Disney pour simuler la neige.

Le 28 janvier, deux chercheurs ont publié les résultats d’une étude plus approfondie de l’événement dans le journal Nature Research. Selon le National Geographic, l’un des deux chercheurs aurait contacté l’équipe d’animation responsable des effets spéciaux de La reine des neiges pour comprendre le système de modélisation de la neige utilisé dans le film.

En apportant quelques modifications au code de l’animation, il a ainsi pu simuler réalistement les déplacements de la neige et les blessures infligées au corps humain par celle-ci. C’est entre autres cette analyse qui aura ensuite permis aux deux chercheurs de conclure qu’une forme d’avalanche particulière est très certainement responsable de la tragédie.

 

Gargantua, première modélisation réaliste d’un trou noir?

Malgré un scénario qui semble par moment exagéré, le film Interstellaire s’est appuyé sur plusieurs théories scientifiques solides afin de construire son récit. Tant les trous de vers et les dangereuses exoplanètes que l’étrange relativité temporelle créée par l’attraction d’un trou noir se basent sur des idées qui proviennent du cerveau d’Einstein et d’autres génies des sciences.

Ces éléments de réalisme intégrés dans une histoire qui reste de la simple fiction sont attribuables à l'astrophysicien Kip Thorne, qui a travaillé de près avec Christopher Nolan lors de l’élaboration du film. C’est aussi grâce à lui qu’Interstellaire possède une modélisation réaliste d’un trou noir, baptisé Gargantua, cinq ans avant que la première photo de l’un de ces objets célestes soit capturée.

Le trou noir Sagittarius A*, photographié en 2019

Le trou noir Sagittarius A*, photographié en 2019. Photo : National Science Foundation via Getty Images

C’est grâce à une simulation technique basée sur des formules mathématiques complexes que l’astrophysicien et les spécialistes en effets spéciaux travaillant sur Interstellaire ont réussi à créer une reproduction aussi fidèle d’un trou noir au cinéma. Selon un article publié dans le journal de l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN), le simple rendu de Gargantua sur un ordinateur a nécessité plus de 100 heures.

En comparant Gargantua à la photo de Sagittarius A*, le trou noir supermassif au centre de notre galaxie, il est facile de constater que l’effet de la lumière sur le disque d’accrétion des trous noirs a été représenté avec génie dans le film de Christopher Nolan.

 

Les périples sous-marins de James Cameron

Au-delà d’une histoire d’amour, Titanic, de James Cameron, représente aussi le fruit de fouilles historiques qui ont permis d’explorer l’épave sous-marine du paquebot. Pour ce film, le réalisateur canadien n’a pas hésité à faire évoluer les techniques d’exploration sous-marine.

James Cameron et son sous-marin, le Deepsea Challenger. Photo : Saul Loeb, AFP via Getty Images

James Cameron et son sous-marin, le Deepsea Challenger. Photo : Saul Loeb, AFP via Getty Images

Parmi les technologies conçues pour réaliser Titanic, on trouve notamment des caméras sous-marines télécommandées et un appareil de propulsion pour les tournages sous l’eau. C’est entre autres avec l’aide de son frère, un ingénieur aujourd’hui spécialisé dans les technologies sous-marines, qu’il a pu mettre au point ces inventions.

Le tournage du Titanic a aussi incité James Cameron à s’immerger dans sa passion en explorant par lui-même les endroits les plus profonds des océans, à bord de différents véhicules submersibles. Lors de ses périples dans les années qui ont suivi la sortie du film, il a notamment découvert plusieurs espèces inconnues en plus d’atteindre un record de profondeur en solitaire avec son sous-marin lors d’une visite du point le plus bas de la fosse des Mariannes, à plus de 10 000 mètres sous le niveau de l’océan.

 

Une technique d’imagerie novatrice

Le film Matrix est surtout reconnu pour ses cascades, ses effets spéciaux et son scénario déjanté qui mélange la philosophie à la science-fiction. En dehors des écrans verts et des animations faites à l’ordinateur, plusieurs effets pratiques ont aussi contribué à la popularité de l'œuvre des Wachowski. L’un de ces effets, le bullet time, a ouvert la porte à une foule d’innovations en matière de captation d’images.

Les coulisses du « bullet time» de Matrix.


Ce moment clé du film où Néo évite des tirs ennemis dans une scène au ralenti a été réalisé à l’aide de 120 caméras disposées tout autour de l’acteur Keanu Reeves. Chaque appareil prenait une photo avec quelques millisecondes d’écart, ce qui a ensuite permis de reconstruire la scène que nous connaissons bien aujourd’hui.

Il s’agit d’un procédé qui a inspiré les méthodes de captation utilisées en ce moment même pour la production de contenus en réalité virtuelle, ainsi que pour la modélisation des personnages ou des objets dans certains jeux vidéo.